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LE QUAI M, UN ACCORD PARFAIT À LA ROCHE-SUR-YON



Installation (Article extrait du site de AS la revue)

Construire en zone fortement urbanisée est un vrai luxe, une équation parfois difficile à résoudre. Cette construction sur plusieurs niveaux regroupe tout ce que nous pouvons attendre d’une scène de musiques actuelles de dernière génération. La proposition coche toutes les cases, avec un projet à la fois raisonné et raisonnable, inscrit au coeur des préoccupations locales, environnementales, éducatives et socioprofessionnelles.

Implantation au chausse-pied

Le terrain alloué à la construction est cerné de toutes parts. Les limites de propriétés ont été optimisées au plus juste. Au sud se trouve un parking réservé aux usagers de la gare ; à l’est, les quais et les voies ferrées ; au nord, un terrain constructible et à l’ouest, une desserte de voirie dans le prolongement de la parcelle. Cette implantation interagit inévitablement sur l’organisation des espaces avec, entre autres, une légère diminution constatée dans la capacité des accès public et une réduction de la surface disponible au niveau de la cour logistique. L’accès de nuit ne pose aucune difficulté. L’entrée du parking est sécurisée par deux portails motorisés dont le contrôle d’accès est commandé par badges et digicode. Un coffret de raccordement, installé à proximité de l’entrée des artistes, est à destination des bus de tournée.



Principe acoustique

La construction en élévation de niveaux, couplée à la simultanéité des usages, engendre des préconisations acoustiques importantes. Pour ce faire, la structure du bâtiment et les piliers reprenant les descentes de charges reposent sur des massifs indépendants, isolés de leurs dalles primaires. La salle Delta, totalement indépendante des autres activités, remplit haut la main l’ensemble des attendus de la notice acoustique.

Ce compartiment, établi en pleine hauteur, traverse l’ensemble des niveaux, du R-1 (fosse publique) à la toiture ; une organisation qui a permis d’utiliser des techniques d’isolement classique (atténuation naturelle) dont les préconisations visent à éloigner ou à intercaler des volumes tampons en regard des autres volumes d’émissions. L’empilage de fonctionnalités, situé dans le quart sud-ouest du bâtiment, s’avérait plus compliqué à résoudre. Les difficultés se concentrent ici entre les studios de répétition (1 à 3) implantés en rez-de-chaussée et le Club situé juste au-dessus au niveau R+1. La notice acoustique reprend un principe de base bien connu dit de “boîte dans la boîte”, dont les fondations soumises à vibrations sont isolées par l’intermédiaire de dalles flottantes montées sur ressorts ou plots néoprènes antivibratiles.



Organisation des flux

La gestion de flux est on ne peut plus simple ; aucun parcours en longue distance ou rupture de charge n’est à déplorer.

Nous avons, entre autres, cet accès direct à la grande scène sous la forme d’un large couloir de service, relié d’un côté par un sas acoustique à double porte et de l’autre par un dégagement en direction de la cour de service donnant sur l’extérieur au travers d’une porte sectionnelle motorisée.

Le déchargement s’effectue à même le sol. L’exploitant justifie l’absence d’un quai de déchargement au regard du gabarit moyen des véhicules attendus et de la place disponible.

Nous pouvons regretter l’absence d’une véritable zone de livraison qui aurait pu se situer en proximité du monte-charge. Les principaux locaux techniques sont attenants aux dégagements du rez-de-chaussée.


L’accès en niveaux est d’une lecture très simple :

  1. Niveau rez-de-chaussée : grande salle, studios, loge rapide, locaux techniques

  2. Niveau R+1 : vide de salle, Club, mezzanines, terrasse, loges, locaux techniques

  3. Niveau R+2 : passerelles, administration, catering, cuisines.



Tour d’horizon

La salle Delta se distingue par ses dimensions (26 m x 16 m) et sa configuration frontale mixte (public debout et assis) avec un parterre en deux niveaux, des bergeries, un grand balcon, l’ensemble servi par un espace scénique de 15,90 m x 9,40 m.

Le Club est de dimensions plus modestes (15 m x 9 m) et propose un espace scénique confortable de 8,40 m x 6,15 m. Nous découvrons ici tout ce qu’il est possible d’attendre d’une SMAC de dernière génération avec, de surcroît, une vision augmentée de l’ensemble des préconisations.

Les dispositifs de levage sont plutôt classiques, constitués avec des sous-ensembles moteurs et ponts, raccordés sur des guides de coulissements desservis par un niveau de passerelles. Les salles, les espaces scéniques et l’ascenseur monte-charge sont accessibles aux plates-formes élévatrices de personnels.




Marché d’investissements raisonné

L’un des nombreux points forts porte sur le travail d’analyse déployé lors de la sélection des offres. Une relation de proximité d’une rare qualité a permis d’aboutir à des solutions technologiques très maîtrisées en termes de coûts et à une vision augmentée dans le travail de préconisations, tant sur le marché de travaux que sur le marché d’investissements.

Les critères d’appréciation sont les éléments de base servant à l’analyse des offres. Ils sont pondérés afin de leur attribuer une importance plus ou moins grande. Bon nombre de ces critères sont officiellement décrits dans la directive 2014/24/UE(1).

L’acheteur peut aussi choisir librement les critères d’analyse qu’il pourra pondérer s’il le souhaite. Nous pouvons citer à titre d’exemple :

  1. La rencontre avec les candidats, la démonstration des matériels

  2. Les explications sur leur entreprise (histoire, vécu et évolution)

  3. La maîtrise de la chaîne de production

  4. Le secteur recherche et développement ainsi que la démarche de développement durable.



Investissements à long terme

Marques premium

Guillaume Suzenet, directeur technique, nous explique :

L'objectif n°1 d'un utilisateur est de répondre pratiquement à 100 % aux exigences présentes dans les fiches techniques des productions de tournée. Le Quai M est un projet à la fois ambitieux et technologique. Néanmoins, nous sommes bien conscients que nous ne représentons qu'un petit budget à l'échelle nationale. La politique pluriannuelle d'investissements déjà engagée, et qui reste généreuse, ne permet pas de revenir sur les gros postes d'investissements. La moindre erreur en préconisations se paye au comptant. La situation géographique des distributeurs et installateurs/prestataires (avec un délai d'intervention inférieur à deux heures) permet à l'équipe du Quai M d'établir une relation de proximité et de confiance qui facilite grandement les opérations de maintenance. Cette organisation des choses leur donne la possibilité de garantir la complémentarité des produits lors, par exemple, des demandes de complément

Il souligne également que :

la location longue durée reste une possibilité. Mais compte tenu d'un appel d'offre en marché public, couplé avec une relation ville/exploitant basée sur un contrat d'objectif, la Ville reste dans tous les cas propriétaire du matériel. Les services juridiques sont très clairs sur ce point". Le mécanisme est plus facilement envisageable dans le cadre d'une subvention accordée à un exploitant disposant par exemple d'un contrat de mise à disposition. Dans ce dernier cas, l'association est propriétaire ou locataire du matériel. Guillaume Suzenet ajoute : "Une dernière constante importante est d'éviter de s'éparpiller, travailler avec un nombre de fabricants/distributeurs/installateurs limité, réduire le nombre de nos interlocuteurs, augmenter la force de frappe avec des propositions de budgets conséquentes nous permettant de travailler au plus juste les remises accordées

Système de diffusion retenu : Adamson

Guillaume Suzenet, très affirmatif sur ce point, nous explique que :

sur le lot sonorisation et éclairage scénique, la relation que nous avons établie avec la société locale Concept Audiovisuel s'apparente bien plus à une assistance à la maîtrise d'ouvrage. L'entreprise retenue dans le cadre du marché d'investissements est allée bien au-delà de ce que nous pourrions appeler un ‘accompagnement à la livraison' au sens classique du terme

Le choix de la diffusion sonore remonte à l’origine du projet. C’est un des points de réflexion essentiel qui vient s’aligner avec la politique générale de la direction, très attachée au partenariat de longue durée avec les entreprises de proximité. Le choix des produits sur ce lot tenait à de nombreux facteurs dont la géométrie très particulière des deux salles.

Du fait du balcon, de l’épaisseur des passerelles, des différents niveaux et des bergeries, la simulation démontre toute la complexité de la volumétrie de la salle Delta. Les résultats furent sans appel : dans sa globalité, la charge acoustique de la salle se comporte comme plusieurs volumes indépendants, situation qui impose la préconisation pour des systèmes à très haut niveau de réjection.

À la lecture des dossiers, la réponse en systèmes Adamson, produite par DV2 et son distributeur local Concept Audiovisuel, fut la plus pertinente.

Convaincue par la couleur et les performances du système, l’équipe hésitera un temps entre la version précédente IS non amplifiée et le dernier modèle en date Adamson CS amplifiée, déjà en service à Antipode 2 à Rennes.

Sur les conseils de l’installateur, l’exploitant a préféré installer le système le plus éprouvé des deux, à savoir la série IS. Une sélection assumée dans le paysage des salles régionales et qui permet au Quai M de proposer un design sonore qui lui est propre. L’équipe constate qu’à la lecture des fiches techniques, les régisseurs de tournée semblent ravis et ne font, jusqu’à maintenant, aucune remarque particulière sur le système en place.




Équipements de régie : que choisir ?

Guillaume Suzenet : C’est un choix cornélien. Il faut répondre à de nombreux critères et rester dans la fourchette budgétaire prévue. Ce n’est pas si simple dans une période post Covid. Les modèles retenus doivent proposer à la fois une architecture et une ergonomie raisonnables, garantir aux équipes de premières parties et aux formations en résidence une prise en main pratiquement immédiate et surtout ne pas être retoqués par les équipes techniques de tournée. La pression des productions s’affirme plus fortement sur les équipements de régie avec, par exemple, des demandes récurrentes de compléments pour des pupitres de mixage Yamaha CL5. Il fallait rester attentif aux délais de livraison attendus sur certains produits phares dus, entre autres, aux difficultés d’approvisionnement. Guillaume Suzenet : Nous sommes restés très attentifs à la maîtrise de la chaîne commerciale des industriels ; ce point faisait partie des critères de vigilance de l’appel à candidature. C’est un melting pot entre le prix, être livré à temps et répondre à la majorité des utilisateurs. La même politique a été appliquée dans le choix du parc lumière : c’est très embarrassant car certains fabricants proposent plusieurs gammes de produits par an mais l’investissement ne pouvait porter que sur des modèles très récents.

Les projecteurs devaient être adaptés à la volumétrie des espaces scéniques tout en proposant une ergonomie raisonnable. Un critère important tenait dans la prise en compte des risques musculo-squelettiques (pose, dépose, maintenance) avec un critère d’exclusion sur les machines qui dépassaient les 30 kg.



Levage de charges, bonnes pratiques

Coup de chapeau ici à la maîtrise d’usage qui a su faire la part belle au respect et à l’application au sens strict du terme de la réglementation française. Il n’est pas toujours simple de faire face aux usages des équipes techniques extérieures qui peuvent avoir des habitudes de travail différentes. La direction du Quai M a fait le choix d’appliquer les règles suivantes :

  1. Code du travail, article R4323-35 : lorsqu’un équipement de travail servant au levage de charges est à l’arrêt, aucune charge ne peut être suspendue au crochet (version en vigueur depuis le 1er mai 2008)

  2. Arrêté du 25 juin 1980 […] règlement de sécurité contre les risques d’incendie, …

Article L 57 : vérifications techniques et précautions d’exploitation ; § 4 : au-dessus des personnes, tout élément suspendu mobile ou démontable propre au spectacle ou à la série de représentations en cours est admis si l’ensemble des dispositions suivantes est respecté : ils doivent être fixés de manière à ne jamais constituer un risque ; ils doivent être suspendus par deux systèmes distincts et de conception différente.



Rien ne prouve qu’en appliquant des règles différentes, nos voisins européens seraient à l’origine de plus d’accidents. Rien non plus de tangible du côté des équipes de tournée qui pourraient appliquer des techniques différentes. Mais du point de vue de nos assureurs ou de nos juges français qui pourraient être amenés à statuer sur un accident du travail, ce sont bien les règles françaises qui s’appliqueraient dans ce dernier cas, en tenant compte de la hiérarchie des textes et de l’application de la règle la plus contraignante. De manière pragmatique, la direction technique du Quai M s’en tient à une procédure de manœuvre à deux états :

  1. En charge statique : les ponts sont maintenus à leur altimétrie courante à l’aide de Deck chains, les palans motorisés et les dispositifs antichute de charge restent en place sans supporter la charge

  2. En charge dynamique : les moteurs reprennent la charge, les Deck chains au mou sont libérées et décrochées depuis la passerelle, les ponts sont ensuite chargés au sol mus par les palans et sécurisés par leurs dispositifs antichute de charge qui leur sont associés.



Réseaux scéniques courants forts

C’est assez rare pour être relevé, mais nous avons ici une maîtrise d’usage qui est intervenue dans les préconisations du BET des lots électricité. Nous noterons principalement la disparition pure et simple du transformateur d’isolement habituellement préconisé en tête d’alimentation du département son.

Apparemment, cet équipement coûteux, assez peu sollicité, ronronnant et chauffant inutilement, ne semble manquer à personne. Comment pouvait-il être possible de réaliser une isolation galvanique efficace, d’un secteur d’alimentation par rapport à un autre, alors qu’au final, on nous impose une référence commune de mise à la terre des masses des schémas de liaison à terre ?

Rappelons à toutes fins utiles que les conducteurs de protection et de liaisons équipotentielles principales n’ont pas seulement pour rôles la protection des personnes mais permettent, dans le même temps, de satisfaire aux critères d’exigence de la norme de compatibilité électromagnétique des matériels.

La présence de matériel de haute technologie, d’alimentation à découpage, de variateurs de vitesse et l’augmentation des courants de courts-circuits Icc imposent la prise en compte de nouvelles prescriptions en termes de protection électrique. Nous connaissions les courbes AC (classiques) et A (composantes continues), mais la direction technique du Quai M, a réussi à imposer la mise en place de disjoncteurs différentiels DDR courbe F(*) Ces disjoncteurs sont plus chers mais particulièrement bien adaptés aux réseaux numériques et aux systèmes automatisés.

(*) Conçus pour protéger les appareils sensibles aux microcoupures électriques (ordinateurs et autres outils informatiques, systèmes d’alarme, …)






A propos de l’auteur | Patrice MOREL

Électrotechnicien de formation initiale, entraîneur et enseignant dans le domaine de la voile, mon embarcation a terminé sa course dans une salle de spectacle de la banlieue nantaise. La fin des années 80′ à Nantes fut marquante avec les Allumés de Nantes, l’arrivée des Royal de Luxe à l’usine LU, la Bitch Génération, … C’est Vincent Priou (ex Trampolino) qui à l’occasion de son Festival de musique nommé Plein Watt (sur 3 saisons) m’a balancé aux commandes de ma première console de retours de scène.

En 1987, j’ai signé mon premier CDI au sein de la société Lumen, installateur et intégrateur d’équipement scénique. L’aventure se poursuit avec la société Exap à la Rochelle, prestataire et installateur de la Scène nationale de la Rochelle, du Festival Les Francofolies, …

Comme beaucoup, j’ai eu un parcours atypique mêlant périodes de régie son, régie générale et direction technique dans l’événementiel, régies de tournées, périodes de création. L’attractivité des productions parisiennes terminera d’engager mon processus de professionnalisation dans le domaine de l’encadrement avec les productions de Jean-Claude Camus, Gilbert Coullier, puis en tant que directeur de production avec Alias Production. Puis suivra une période de régies son façade & amp retours qui prendra fin en 2005 sous contrat CDD chez Garance Production à l’Élysée Montmartre. Formateur en électricité dès 1984 à ARTS qui deviendra par la suite l’association STAFF à Nantes, je poursuis principalement mes actions de formation à La Filière (CFPTS/CFA-SVA) et au CMN (ex IRMA) sans pour autant oublier mes origines nantaises à Staff.

Depuis mars 2010, je suis salarié en tant que rédacteur de la presse spécialisée et photographe pour la revue AS Actualité de la Scénographie.

Crédits : Photos : Patrice MOREL | Texte : la revue


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